Une invitation impérative me chassa de nouveau dans un omnibus qui nous conduisit au steamer…

De Cologne à la traversée de la Manche

Image : Gare d'Ostende (tous droits réservés)

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Là, en attendant le départ du convoi, je retrouvai des Suisses de Schaffhouse, de Thurgovie et de Saint-Gall, ce qui me fit grand plaisir. Nous entrâmes tous ensemble dans un wagon de 2e classe et toute cette journée fut employée à traverser la fertile, mais uniforme Belgique dont nous ne vîmes guère que les riches campagnes, car le chemin de fer passe à côté des villes. La seule de ces villes que l’on voie est celle de Liège que domine la route et qui paraît être une ville très industrieuse à en juger par le nombre de bâtiments de fabrique et hautes cheminées que l’on aperçoit. La ville elle-même a un air beaucoup plus moderne que je m’y étais attendu. La seule chose remarquable que j’aie vue depuis Liège, c’est la gare du chemin de fer à Gand ; elle est fort grande et fort belle et sert de promenade ; comme c’était dimanche, il s’y trouvait du beau monde en quantité. Il fallut bientôt la quitter, car les conducteurs belges ne donnent aux passagers que bien peu de temps et les obligent presque au jeûne jusqu’à Ostende où nous arrivâmes dans la soirée. J’aurais aimé parcourir cette ville et surtout les bords de la mer, mais une invitation impérative me chassa de nouveau dans un omnibus qui nous conduisit au steamer dans lequel nous devions traverser le détroit. Il était près de huit heures, et cependant le bateau ne partit qu’à 11 heures. Voulant me conformer aux conseils qu’on m’avait donnés et obéissant d’ailleurs à un appétit qui n’avait fait que s’accroître, je me fis donner à souper et pris deux verres de vin, après quoi, j’allai me coucher sur la banquette creuse qui domine le large canapé du salon et m’y tins coi, car d’ailleurs, le mouvement est fort difficile dans cette étroite couchette et soit par l’effet de ces précautions, soit par un bénéfice de mon tempérament, je fus presque entièrement à l’abri du mal de mer qui tourmenta horriblement la plupart de mes compagnons pendant les neuf heures de notre traversée. Il est vrai que le vent était fort et qu’il ne fit que s’augmenter pendant la nuit. Ce ne fut que le matin, quand je fus sorti de mon nid que je sentis les atteintes de ce vilain empoisonnement de Neptune. Il commençait à me tenir dans ses griffes, quand étant allé sur le pont, je parvins à lui échapper.