J’ai retrouvé tous les agréments des bateaux à vapeur du Rhin…

De Francfort à Cologne

Image : Königswinter vers 1850 (tous droits réservés)

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Le lendemain de bonne heure, un nouveau convoi de chemin de fer nous a conduits à Biberich où mes deux compagnons, MM. Monnier et Sueur se sont séparés de moi pour aller visiter Wiesbaden et gagner de là la Hollande. Je suis donc entré seul dans un bateau à vapeur qui allait partir et où j’ai retrouvé tous les agréments des bateaux à vapeur du Rhin, justement célébrés par toutes les commodités dont on y jouit et les belles contrées qu’ils traversent. Passé devant Coblentz, ville fort animée, du moins dans ce moment-là et où paraissait se célébrer une fête tant on y voyait de drapeaux arborés et de gens amassés dans un grand bateau qui était prêt à quitter le bord. Notre bateau y débarqua quantité de ballots, puis reprit aussitôt sa course dans un lit presque toujours encaissé, où des vignobles s’élèvent à droite et à gauche, dominés par des crêtes parsemées de débris de forts et de châteaux. De temps en temps un village baigné par l’eau du fleuve annonce au voyageur qu’il est dans une contrée habitée. On quitte avec regrets ces sites pittoresques que changent souvent d’une manière inopinée les contours du fleuve, pour descendre au salon où un dîner confortable et même recherché attend les passagers. J’étais assis à table depuis une demi-heure, quand on m’annonça que le bateau approchait de Königswinter où je devais débarquer. Vite, je me rendis sur le pont d’où je ne tardai pas à apercevoir les deux charmantes îles de Grafenwerth et de Nonnenwerth. C’est un peu au-delà qu’est la ville de Königswinter où l’on me mit à terre et d’où je m’acheminai à pied, d’un pas rétrograde, vers le village de Honef, où est située la demeure de Mr. et Mme Hölterhof, oncle et tante de Mlle Pauline Meyer, notre élève. J’eus le bonheur de trouver ces deux personnes à la maison et je fus accueilli par elles de la manière la plus aimable. Pendant les trois heures que je passai dans cette famille hospitalière, on me conduisit sur la hauteur dans une chaumière d’où l’œil embrasse un des plus charmants paysages qu’il soit possible de contempler. D’un côté, (c’est celui où l’on est) s’élèvent les 7 montagnes, dont quelques-unes (entre autres le Drachenfels) élèvent leurs cimes ardues presque immédiatement au-dessus du fleuve. Au milieu du Rhin, les deux îles dont j’ai parlé ; au-delà, une rive d’abord étroite et dominée par la hauteur du Rolandseck, mais qui s’élargit bientôt et qui parmi des arbres touffus, des vignobles, des champs et des prairies, fait apparaître sur un sol accidenté des clochers et des châteaux jusqu’à une ligne de hauteurs peu élevées qui terminent mollement cette scène si attachante. Mr. Hölterhof m’avait reconduit à Königswinter et j’admirais encore aux rayons du soleil couchant cette belle et riche contrée, lorsqu’arriva le bateau dans lequel je devais continuer mon voyage. Il fallut me séparer de mes amis et recommencer ma navigation paisible à travers les campagnes du Rhin, lorsque la nuit épaississant ses voiles les déroba enfin à ma vue et il était presque nuit close, lorsque je passai devant la savante ville de Bonn. L’obscurité était complète lorsque j’arrivai à la bruyante et commerçante Cologne. Je comptais la revoir à mon retour et passer une journée dans une autre famille amie ; aussi ne m’y arrêtai-je pas et le lendemain à 6 h. je partis en omnibus pour la gare du chemin de fer de Belgique.