Premiers soucis d'élégance

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Heidelberg, le 11 novembre 1906


Ma chère famille,

Merci pour vos bonnes lettres qui comme toujours m’ont bien réjoui.

Ma vie se continue toujours la même, apportant chaque semaine les mêmes cours et les mêmes devoirs. Je ne m’en plains pas, au contraire, mais je ne peux pas ainsi vous écrire des faits nouveaux. Si je vous parlais de mes cours, vous vous plaindriez tout de suite que je refais de la philosophie au lieu de vous dire si je brosse mon chapeau régulièrement ou si je me rase trois fois par semaine. (…)

 

Heidelberg, le 18 novembre 1906

Je vais étonner petite maman et lui paraître bien coquet, mais le besoin d’une redingote commence à se faire sentir pour moi. Dans les fêtes universitaires, la plupart des étudiants viennent en grand noir, c’est aussi la tenue adoptée pour les concerts ou le théâtre. Et chose curieuse, les examens se passent en frac et gants blancs. Il se pourrait que cet hiver je sois invité quelque part ou assiste à quelque concert et j’aimerais alors un habit de circonstance, redingote, pantalons noirs, gilet d’autre couleur, peut-être noir et blanc. Je laisse la chose à votre bon jugement. En tout cas, c’est la première fois que je désire un habit et c’est sûrement un signe de sagesse. J’ai ri tout seul l’autre soir en décrottant le bas de mes pantalons à la surprise qu’aurait chère maman à me voir à cet ouvrage. (…)

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