J'avais un petit enfant

< Page précédente    ·    Table des matères    ·   Page suivante >

10 Mai 1864.  J'avais un petit enfant, qui était la joie de ma vie, mais il est allé à Dieu et maintenant pour moi le monde est triste et désert et je voudrais bien le quitter aussi. Je n'entends plus dans la maison ce pas vif et léger qui donnait la vie et cette voix joyeuse qui animait tout. Où est le charme d'une promenade, où je ne la conduis plus, elle était le but de toutes mes pensées et je rapportais tout à elle.

Que j'aimais la voir là dans son petit fauteuil, mille jouets sur ses genoux, parlant son joli langage doux pour moi comme le chant d'un oiseau. Que je l'aimais demandant sa petite soeur, lui faisant ses caresses, changeant pour elle sa petite voix, et l'appelant joyeusement: peti sieur. Ou sa petite main dans la mienne demandant d'un regard son grand-père, lui portant dans ses bras ses plus beaux trésors. [...]

15 Mai. Dieu que son souvenir est vivant; ne vais-je pas la voir apparaître là, à cette porte, ses cheveux en désordre, son tout beau regard, sa bouche montrant ses perles, sa main caressante, sa courte robe et ses petits pieds qui courent toujours. Et dire que jamais je ne serrerai plus cet enfant dans mes bras. Mais cette nuit peut-être elle m'appellera, et comme autrefois je la prendrai dans son petit lit et je lui dirai de douces choses pour l'endormir près de moi. Oh que de joies perdues, et quel chagrin immense pour tout ma vie.


< Page précédente    ·    Table des matères    ·   Page suivante >